Persepolis
Prix du jury au festival de Cannes de cette année, la sortie de Persepolis est un évènement dans la catégorie film d’animation français. Adapté de la BD du même nom, parue en plusieurs volumes de 2000 à 2003, Persepolis est non seulement l’autobiographie de jeunesse d’un des ses auteurs, Marjane Satrapi mais aussi le résultat de l’association de deux dessinateurs, l’œuvre donc de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud.
Avant d’être le nom d’une BD et celui d’un film, Persépolis était une ville iranienne, détruite en 300 av JC par un incendie. Cette ville est aujourd’hui un site archéologique, classé patrimoine mondial à l’UNESCO, dont on peut visiter les vestiges.
Ce petit détour historique m’amène à me demander les raisons qui ont poussées Marjane Satrapi à appeler l’histoire de son exil autobiographique ainsi. Ce qu’elle nous livre d’elle, de son enfance, de son pays ne seraient-ils pas les souvenirs, les vestiges d’une époque, de lieux inaccessibles pour elle, qu’elle nous ferait visiter et qu’elle graverait ainsi près d’elle ? C’est une supposition.
En effet, depuis un peu plus de 7 ans, Marjane Satrapi n’est pas retournée dans son pays. Elle y est persona non grata.
Persepolis, c’est l’histoire d’une petite iranienne qui vit à Téhéran avec sa famille. De 7 à 13 ans, elle vit une révolution, un changement de régime et une guerre. Marjane se raconte, enfant espiègle qui s’éveille à la politique de son pays et qui un jour doit s‘exiler parce que ses manifestations de désaccords avec le régime et ses règles deviennent dangereux pour elle. Persepolis, c’est le désir d’être libre et la privation des siens et de ses racines.
Persepolis est un film d’animation majoritairement en noir et blanc. Seules les scènes représentant un présent conditionnel sont en couleur. Le noir et blanc a été choisit pour accentuer l’effet de nostalgie inhérent à l’histoire. Du coup, nos deux dessinateurs créent plein de nuances de gris et nous recolorent ainsi un passé haut en couleurs.
Ce film est très riche en références visuelles. Selon notre culture, on remarquera de nombreux clins d’œil au cinéma et à la peinture. J’en ai repéré quelques uns comme celui fait au célèbre tableau de Munch « Le cri » et au cinéma expressionnisme. A vous maintenant de les retrouver. Il y en a des évidents et d’autres qui le sont un peu moins. Je ne les ai pas tous vu car ma culture n’est pas très étendue. En tout cas, j’ai pris beaucoup de plaisir à voir ce film. Il est visuellement intense et dramatique. On sent que les images fortes ont été sélectionnées, par plaisir évidemment, mais surtout pour interpeller, peut-être même par provocation. Marjane et Vincent ne veulent pas nous laisser indifférents. Dans ce sens, les dialogues sont incisifs, très modernes, très libres. La dérision et l’humour omniprésents font parti eux aussi des arguments chocs pour décrire l‘absurdité de certaines situations humaines.
J’aurais juste un petit bémol, le film manque un peu de rythme par moment mais rien de grave.
France, 2007. Réalisation : Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud. Scénario : Marjane Satrapi. Avec : Catherine Deneuve, Chiara Mastroianni, Danielle Darrieux. Durée : 1h35mn.