99 F
« Tout est provisoire : l’amour, l’art, la planète Terre, vous, moi.(…) Tout s’achète : l’amour, l’art, la planète Terre, vous, moi.(…) Tout est provisoire et tout s’achète. L’homme est un produit comme les autres. » Profond !
« 99 F » la version grand écran commence par ces paroles , comme le roman de Frédéric Beigbeder dont elle est adaptée, dites sur un ton sentencieux.
Le film commence. Notre pseudo héros, Octave Parango, créatif publicitaire, s’apprête à sauter du haut d’un building, il s’élance, et sa vie défile. Comment en est-il arrivé là ? Il a été un mauvais garçon ! Pourtant, au départ, il voulait changer le monde, mais il s’est fait rattrapé par les travers d‘un milieu qu‘il critique. Le pauvre, il n’a pas eu de chance. Je dirais : pas de Volonté !
Notre pseudo héros est une tête à claque. Je dis pseudo car il se présente ainsi lui-même. Il voudrait dénoncer la prise du pouvoir économique et politique par les grands groupes industriels, leurs actionnaires et leurs PDG au détriment du consommateur et de la planète. Le chemin de la rédemption est long et caustique pour un lâche, sans ambition autre que celle de satisfaire sa mégalomanie.
Consommateurs, vous êtes des vaches à lait, et vous finirez fous, nourris de rêves avariés si vous ne vous réveillez pas ! C’est en substance le propos du film. Il se présente donc comme une sorte de documentaire romancé à but didactique. Cette intention est noble en soit, personnellement je ne la trouve pas crédible. Je me sens plutôt insultée. Octave ou Frédéric, peu importe, nous méprise, nous, spectateurs ou consommateurs, tout autant que ceux qu’ils dénoncent, pire il se croit au dessus de tous.
« 99 F » , le film ou le roman, se veut révolutionnaire alors que son discours est faussement moralisateur sur un constat déjà vieux. Et oui, en effet tout se périme !
Heureusement, soutenue par la participation confondante de Jean Dujardin dans le rôle d’Octave, la pellicule donne un peu de corps à une œuvre originelle, qui fait sourire mais qui peine à se justifier, si ce n’est dans l’évocation d’un milieu écoeurant.
Très esthétisant le film est réalisé comme un spot géant, à l’image de l’univers dans lequel évolue notre pseudo héros, la Publicité. Jan Kounen s’en donne à cœur joie, la matière ne manquant pas : Argent, produits de luxe, univers tendance, jolies filles, beaux appartements, lieux branchés, garçons friqués, folie hystérico-économique… Il lui donne cette couleur, psychédélique, rock en roll, faussement enjouée, absurde, souvent cruelle et cynique, à la mesure du personnage principal.
Jan Kounen signe, malgré une histoire de remords douteux, une comédie rythmée et astucieuse dans sa forme, qui mine de rien nous lègues quelques images peu reluisantes du genre humain et assez saisissantes.
Somme toute, « 99 F » n’est pas encore le « The Big One » français.
France, 2OO7. Réalisation : Jan Kounen. Adaptation du roman 99 F de Frédéric Beigbeder. Avec : Jean Dujardin, Jocelyn Quivrin, Patrick Mille, Vahina Giocante, Elisa Tovati. Durée : 1h40mn.